26.2.10

Le déséquilibre de Nash.

Je le vois chaque semaine, juste deux heures, durant ce cours. Nous partageons cette salle, nous sommes assis dans le même périmètre, quelques mètres nous séparent, parfois moins.

Il est grand, très grand. Je ne pourrais même pas croire qu’il est Australien, il a l’air d’un mexicain, je le vois à tirer sur un cigarillo, le sombrero sur la tête. Il est très mal habillé, mais on s’en fout un peu. A la réflexion, je crois bien qu’il est habillé chaque semaine à l’identique. Mais on s’en tape complètement. Sa tenue vestimentaire ne nous intéresse pas. Non, ce sont ses yeux qui nous attirent. Ils nous regardent, ces yeux, et ils nous parlent.

Quand il a su que j’étais française, il m’a gratifié d’un « Bienvenue », c’était mignon. Cliché, mais mignon de sa part. J’aime bien quand les Australiens/Mexicains me parlent français.

Nous sommes donc assis dans cette salle de cours, et je ne sais pas comment l’aborder. Au début du cours, quand il y a peu de monde ? à la fin, quand il y a du bruit dans la pièce ? J’ai hésité pendant plusieurs semaines, et finalement, lâchement, je lui ai proposé un rendez-vous par e-mail. L’e-mail, invention superbe pour toute personne qui n’en pas confiance en soi et préfère se cacher derrière un écran. Rendez-vous est donc pris. Nous nous retrouvons sur le campus, ayant prétexté quelques soucis en cours sur lesquels il pourrait m’aider. Sournois, mais il avait bien sûr compris mon intention première : revoir ses yeux, ses yeux qui me racontaient tellement de choses.



Nous n’avons pas parlé du cours. Nous avons beaucoup ri, et ses yeux ont ri pour moi aussi. Il m’a donné son numéro, mais m’a fait promettre d’être discrète.

lign: justify;">Nous nous sommes revus le lendemain, et nous avons dîné. Il m’a proposé un dernier verre chez lui et je l’ai suivi. J’ai eu ses yeux pour moi toute la nuit, qui étaient comme deux petites lanternes malicieuses dans cette pièce sombre de son appartement. La semaine suivante, en salle de cours, j’ai baissé la tête, je n’osais pas croiser ses yeux, ses lumières.



Un peu parce que j’étais très embarrassée.

Et beaucoup parce qu’il est mon professeur d’économie.

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